Chloé R. 13/07/2022

5/5 Voyager, c’est ma normalité

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De retour à Bordeaux après un Erasmus en Irlande, Chloé a pris conscience de ses capacités, mais aussi de ses privilèges.

« T’es toujours partie » ; « Enfin, tu prends le temps de venir nous voir » ; « Tu repars déjà ? Mais tu viens juste de rentrer ! » C’est le genre de phrases que je peux entendre quand je retrouve mes amis de Bordeaux, la ville où j’ai grandi et que j’ai quittée plusieurs fois pour les études ou les voyages.

Erasmus en Irlande : la grande aventure

Je suis partie une première fois, neuf mois, en Irlande dans le cadre du programme Erasmus. C’était nouveau, c’était l’inconnu, j’étais excitée. Tout le monde l’était pour moi. Pour cette grande aventure.

J’y ai fait ma troisième année de licence et c’était comme si je repartais de zéro. Je devais apprendre une nouvelle langue, prendre de nouvelles habitudes, m’adapter, beaucoup, à tout, la météo, la nourriture, les gens.

Même si je pouvais me plaindre de tout ce qui était différent par rapport à chez moi, j’ai appris à aimer ce pays vert et pluvieux. Puis, j’y ai aussi rencontré plein de personnes d’horizons différents, d’autres étudiants Erasmus comme moi, qui venaient des quatre coins de l’Europe.

En coloc avec des étudiants étrangers

Je vivais en colocation avec deux Allemands et une Française, et notre résidence était remplie d’étudiants étrangers. On comparait nos pays, nos habitudes et on se moquait gentiment des traditions des autres.

J’ai découvert beaucoup de choses cette année-là, sur comment est la vie dans les autres pays. Je me suis rendu compte que j’avais beaucoup de clichés, de représentations toutes faites dans ma tête. Et, pourtant, je me pensais ouverte d’esprit !

Quand l’heure fut venue de partir, j’ai regretté de ne pas pouvoir rester plus longtemps. J’avais recréé une routine, des habitudes et tout cela ne me semblait plus si étrange et incompréhensible. J’étais quand même contente de rentrer en France car, après tout ce temps, ma famille et mes amis me manquaient.

Mais, une fois la joie de les retrouver passée, j’ai très vite déchanté. J’avais l’impression que rien n’avait bougé en mon absence. Quand je discutais avec mes amis, j’avais l’impression de ne plus être sur la même longueur d’onde.

« Éduquée » au voyage

Pourtant, ils sont tous très tolérants et ouverts d’esprit. Ils m’écoutaient réellement quand je leur racontais mon expérience à l’étranger, mais je voyais bien qu’ils ne pouvaient pas totalement comprendre ce que j’avais vécu. Je me suis demandée pourquoi je ressentais ça et, en discutant de ce décalage avec ma famille, je me suis rendu compte que j’avais été « éduquée » au voyage, à la mobilité.

Tous les deux ans environ, on partait avec mes parents, ma sœur et mon frère dans notre camion pour la Grèce. On roulait jusqu’en Italie d’où on prenait le bateau, on dormait sur le pont à la belle étoile, puis on débarquait en Grèce où on visitait le pays au gré de nos envies.

Pas de plan trop défini, on avait une carte des campings et on se présentait le jour même pour y dormir, espérant qu’il reste des places. On ne parlait pas grec, ma mère maîtrisait deux, trois phrases mais on se débrouillait toujours. Et j’ai fait ça tous les deux ans, jusqu’à mes 18 ans. C’était ma normalité.

En le racontant à mes amis, j’ai vite compris que tout le monde n’avait pas la chance d’avoir cette éducation-là. Ils en ont eu une autre, ni pire ni meilleure, qui ne leur a pas donné cette envie de découvrir autre chose. Ni le sentiment qu’ils en étaient capables.

Un accompagnement nécessaire

Je ne sais plus comment j’ai entendu parler du programme Erasmus, sûrement dans ma famille, mais c’est cette envie de découvrir, d’essayer quelque chose de nouveau qui m’a poussée à postuler.

Dans ma filière, en géographie, peu d’étudiants partaient. Notre enseignante référente sur ce programme nous soutenait dans nos démarches, et son accompagnement m’a réellement aidée à partir.

La bourse Erasmus était également une opportunité incroyable pour moi car le seul frein qui aurait pu m’empêcher de vivre cette expérience était l’argent. Étudier a un coût, mais étudier à l’étranger, encore plus. Grâce à ma bourse, je pouvais étudier et pleinement vivre mon expérience.

Cette opportunité mériterait d’être accordée à tout le monde. Et non seulement au niveau études supérieures. La mobilité devrait être encouragée à tous les âges.

Rendre accessible Erasmus

Le rendre obligatoire n’est pas la solution, cela pourrait être vécu comme quelque chose de subi et n’apporterait pas forcément du positif. Par contre, faire en sorte que cette opportunité existe pour tout le monde et que l’accompagnement soit adapté à chaque personne, ça je pense que c’est vraiment essentiel.

Cette première expérience fut suivie de nombreuses autres : trois mois en Inde, neuf mois en Allemagne. Chaque fois, j’ai tellement appris ! Que ce soit à faire des efforts pour comprendre une autre façon de penser, de vivre, ou à accepter de ne pas tout comprendre (surtout en Inde), à faire fonctionner des projets rassemblant des nationalités différentes en Allemagne, à trouver comment travailler ensemble quand nos modes de fonctionnement sont si différents.

SÉRIE 1/5 – Malak rêve de s’installer à Dubaï. Pour elle, cette ville est symbole de richesse et libertés, notamment celle de pratiquer sa religion.

Au centre de l’illustration, on voit une jeune femme portant le voile les bras levés au ciel, en gardant les yeux fermés. Derrière elle, on voit un bâtiment coloré de style arabe, avec de grandes colonnes fines rassemblées en trois voûtes d’ogive. Au-dessus de sa tête, on voit trois bulles : à gauche, une main tenant des sacs de shopping ; au centre, un bâtiment avec piscine creusée, des palmiers et une chaise longue ; à droite, une personne faisant du kitesurf sur la mer.

Mais c’est cette première expérience en Irlande qui fut la plus importante de toutes, car elle m’a prouvé à moi-même que j’étais capable de le faire. Je sais maintenant que je peux vivre et travailler dans un autre pays. Mon champ des possibles s’est agrandi.

Chloé, 25 ans, salariée, Toulouse

Illustration © Merieme Mesfioui (@durga.maya)

 

Bons plans pour voyager pas cher

En France (et Allemagne)

– Pass Jeune TER : mis en place en été 2020 et 2021, puis supprimé par la SNCF. Mais si tu passes la frontière, l’Allemagne propose un ticket à 9 euros par mois pour voyager dans tout le pays jusqu’au 31 août.

Carte Avantage Jeune : si tu as moins de 27 ans, elle te permet de réserver toute l’année des billets de train moins chers et plus facilement remboursables.

– Sinon, il y a toujours les autobus Flixbus et Blablabus ou le covoiturage Blablacar. Tu peux comparer leurs offres sur Trainline. Encore moins cher, l’autostop, mais plus risqué : mieux vaut être accompagné·e et le pratiquer en journée.

En Europe

Interrail : pour voyager en train à travers l’Europe, jusqu’à trois mois. Si tu as 18 ans, DiscoverEU organise chaque année un concours pour faire gagner des pass gratuits : le prochain, ce sera à l’automne 2022.

Départ 18:25 : si tu as entre 18 et 25 ans et que tu remplis les critères, tu peux recevoir une aide de 250 euros pour partir en vacances. À condition de réserver un des séjours proposés !

– Pendant l’année scolaire, si tu as envie d’aller étudier ou de faire un stage à l’étranger, il existe plein d’aides financières, en fonction de ta situation et de là où tu vas.

Dans le monde

Programme « vacances-travail » : un visa qui permet aux 18-30 ans d’aller travailler à l’étranger pendant un an.

Woofing : en échange de quelques heures de travail par jour dans une exploitation agricole écologique, tu es accueilli·e, logé·e et nourri·e.

Couchsurfing : pour trouver un canapé où dormir, n’importe où dans le monde, rencontrer des gens et découvrir plein d’endroits.

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