Mayssa A. 18/03/2022

Accusée de racisme par ses camarades blancs

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Au collège, Mayssa a subi le racisme de ses camarades sans que la prof ne fasse rien. Elle aurait aimé un meilleur encadrement en classe.

J’étais en cinquième au collège, durant un cours de français. Nous étudions un texte contre le racisme. Dans la salle, j’étais assise à côté d’une personne d’origine française. Elle me fixait pendant un bon moment dans les yeux, et moi, je me demandais : pourquoi me regarde-t-elle ? Ai-je quelque chose sur le visage, ai-je fait quelque chose de mal ? Je ne savais pas. Après m’avoir fixée longtemps, mon camarade assis à côté de moi m’a répliqué de façon directe : « Tu es raciste ? De toute façon, ça se voit que tu n’es pas d’origine française, donc assume. »

Après avoir entendu cela, je me sentais étrange. Personne ne m’avait jamais dit une telle chose auparavant. Au départ, cela ne m’avait pas dérangé car je me disais : « C’est un gamin, il ne sait pas ce qu’il dit, laisse tomber. » Mais lorsqu’il a répliqué le mot racisme à tout le monde, me visant, mes nerfs ont commencé à monter. Les élèves riaient très cruellement. Plusieurs venaient vers moi en me lançant des menaces comme : « Sale raciste, qu’est-ce que tu fais en France, tu n’as rien à faire ici, sale terroriste. »

Une professeure dépassée

Les personnes qui me menaçaient étaient de couleur blanche et d’origine française. Mais heureusement les autres élèves n’ayant pas ces caractéristiques me soutenaient. Je n’étais pas toute seule, donc je me sentais encore plus forte. Avec mes camarades, nous avons décidé d’en parler à notre professeure de français car elle était présente lors de l’événement. Après lui en avoir parlé, elle nous a dit : « On en parlera au prochain cours car ce n’est pas normal ce qu’il se passe. » Mais rien de plus. Elle n’est pas allée voir l’élève en question ou quoi que ce soit.

Le prochain cours est arrivé, et nous avons commencé un débat sans le vouloir. L’élève ne reconnaissait pas ses torts. A ce moment-là, je lui ai dit d’une manière désagréable : « Avant de dire que je suis raciste, est ce que tu sais ce que veut signifier le mot raciste ? » L’élève m’a très rapidement répondu : « Bah oui je ne suis pas bête. Tu veux qu’j’te dise ce que ca veut dire ? Et bien le racisme, c’est lorsque les étrangers menacent, insultent les Blancs. » Pour eux j’étais raciste car je ne suis pas blanche comme eux et je ne suis pas d’origine française. Et pourtant je suis de nationalité française, donc je ne vois pas le problème.

Des menaces pendant des jours

Je me retenais de rire, et dans ma tête je me disais : « C’est une blague, il ose me considérer comme une raciste alors qu’il n’en connaît absolument pas la signification ! » Je lui ai clairement fait comprendre ce qu’était le racisme en lui expliquant : « Le racisme, c’est lorsque des personnes pensent qu’il y a une race qui est supérieure à une autre… » L’élève ne m’écoutait pas, il se fichait de ce que je disais. Il est retourné avec son groupe qui pensait comme lui. Mais pour moi, l’affaire n’était pas finie. Le professeur en question est venu me voir en me rassurant : elle allait en parler à la direction. Mais pour moi, cela ne me rassurait pas assez. On n’a pas parlé plus de ce qu’il s’était passé, et on n’a pas parlé de racisme en classe après ça.

Deux, trois, quatre jours après, les menaces continuaient toujours. Je cumulais, cumulais, cumulais, jusqu’à ce que je décide d’en parler à mes parents. Ils étaient furieux, ils ont contacté rapidement la principale et pris rendez-vous. Lors du rendez-vous, j’ai clairement expliqué la situation. Après m’avoir écouté, elle a pris conscience de ce que je subissais et m’a annoncé les conséquences qu’aurait l’élève en question. Il allait subir une semaine d’exclusion, appel des parents, lettre d’excuses.

Une lettre d’excuse sans sincérité

Au départ je me disais : « Il ne peut pas subir autant, cela fait trop de choses à endurer. » Mais après avoir réfléchi, je me suis rendu compte de ce que moi j’endurais. Le lendemain, mon camarade est venu me donner sa lettre d’excuse et s’excuser. C’était comme si on l’obligeait. Il ne s’excusait pas par lui-même, la manière dont il l’a fait n’était pas sincère. Je pense qu’il avait compris ce qu’il avait fait en soi mais il ne voulait pas être en tort. Après son excuse, il ne s’est plus jamais rien passé, et chacun a continué son chemin de son côté.

Aujourd’hui je suis en troisième, et j’ai mûri. Et lorsque je repense à tout cette histoire, des fois je me dis : était-il nécessaire d’en arriver jusqu’à la principale ? Et puis d’autre fois je me dis que j’ai bien fait, car je subissais énormément. Mais je pense qu’il ne fallait pas aller aussi loin. J’aurais préféré en discuter calmement.

Mayssa, 15 ans, collégienne, Mantes-la-Jolie

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